DEMONS & WIZARDS : Interview avec Hansi Kürsch
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- Le 03/04/2020
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What The Hell a eu l’occasion de rencontrer Hansi Kürsch, chanteur de DEMONS & WIZARDS, projet mené en parallèle de BLIND GUARDIAN, avec Jon Schaffer, guitariste d'ICED EARTH. Nous avons pu parler du nouvel album III, sorti le 21 février de cette année.
Laetitia : Bonjour Hansi et merci de répondre à mes questions. Nous sommes là pour parler du nouvel album intitulé III de ton projet Demons & Wizards que tu as créé avec Jon Schaffer du groupe Iced Earth. Mais tout d’abord, peux-tu nous éclairer sur les circonstances qui ont permis votre reprise d’activité avec ce projet ?
Hansi : Nous avons travaillé dessus pendant près de 15 ans, concrètement depuis 10 ans, 2010, ce qui aurait dû être le moment où l’on aurait pu attendre la sortie de l’album en question. Cependant les emplois du temps d’Iced Earth et Blind Guardian n’étaient pas du tout compatibles, de sorte qu’il était difficile de trouver des créneaux libres en commun. Il y a environ 2 ans, nous avons entrevu la possibilité vers fin 2018 d’entièrement se consacrer à Demons & Wizards en 2019. C’était une envie, nous voulions vraiment le faire, et j’avais pour ma part presque fini mes activités avec Blind Guardian, ça s’est juste un peu tiré dans la longueur. Jon avait fini sa tournée avec Iced Earth, ce qui explique notre décision. Il m’a ensuite présenté ses premières idées, que j’ai ensuite combinées avec des paroles, ce que je fais aussi avec Blind Guardian, en inventant des mélodies allant avec. Vint un moment où nous nous sommes retrouvés et nous sommes dit que c’était le moment d’enregistrer cet album.
Laetitia : Certains n’espéraient plus revoir Demons & Wizards, ça a dont été une belle surprise pour le public français de vous voir à l’affiche du Hellfest 2019. Qu’est-ce qui vous permis d’y être programmé ?
Hansi : Nous n’avons jamais vraiment mis de côté ce groupe. Il a toujours été évident pour nous que nous continuerions. Simplement, comme je l’ai dit, il n’y avait pas vraiment de moment où c’était possible de s’y consacrer pleinement. Il n’y avait donc pas vraiment de sens de s’y remettre. Une fois que nous avons fait part à la presse que nous étions en train de travailler sur un nouvel album, c’est là qu’instantanément des promoteurs de festivals sont venus nous dire qu’ils aimeraient nous avoir en tant que co-headliner, au Wacken comme meilleur exemple. C’est à ce moment que nous nous sommes demandé comment nous pourrions organiser ça, une place de headliner à Wacken n’est refusée que si l’on est vraiment idiot. Et comme tu viens de le dire, peu pensaient que Demons & Wizards existait encore, même si nous laissions souvent sous-entendre durant des interviews que nous voulions continuer de travailler dessus. Cependant il est compréhensible qu’après 15 ans, certains se disent qu’en effet, rien ne suivrait, et certains peuvent tout simplement nous avoir perdu de vue. Donc des demandes sont venues, entre autres du Wacken, proposition que nous avons acceptée. Autre festival qui était intéressé par Demons & Wizards était le Hellfest. Il était pour celui-ci aussi évident que nous devions y aller. En temps normal, il faut avoir fait quelques semaines de concert avant si l’on joue à de telles venues, ce qui nous rajoutait de la pression supplémentaire. Mais ça ne nous a rien fait, comme nous nous sommes bien organisés, et même de sorte que notre album soit du moins enregistré avant que nous partions en tournée. J’ai utilisé les jours de libres entre les festivals pour boucler l’album, ce qui nous a permis d’être au point au Hellfest. Nous avons eu un bon départ et avons joué cinq à six concerts avant, ce qui n’est pas beaucoup. En temps normal un festival comme ça serait à la fin d’une tournée de près de 100 concerts. Ça n’a comme dit pas été possible à cause du manque de temps donné. Nous sommes allés sur scène et avons été nous-mêmes surpris des retours, nous ne pensions pas qu’ils seraient aussi positifs.
Laetitia : Qu’avez-vous pensé du Hellfest ?
Hansi : C’était dans tous les cas un des plus grands festivals où nous avons pu jouer, et c’était génial. J’ai joué pour la première fois au Hellfest avec Blind Guardian en 2007, ainsi qu’en 2016, et on a déjà ressenti une nette différence. C’est clairement un des plus grands festivals. Je disais tout juste que c’est du même acabit que le Wacken, et je trouve qu’au niveau de la line-up, c’est le meilleur aux côtés du Graspop en Belgique. Les groupes sont toujours choisis en harmonie, et Demons & Wizards a eu la chance d’en faire partie. J’étais impressionné par le public et tout simplement par le festival, parce que l’on remarque qu’il y a la volonté de façonner quelque chose de différent, que ce soit au niveau de la line-up ou même de la localisation. Quand l’on pense où ce festival a lieu, c’est quand même impressionnant de rameuter autant de monde dans un endroit comme ça.
Laetitia : Il s’est donc écoulé 15 ans entre votre précédent album et celui à venir. Et vous avez d’ailleurs fait remastériser vos deux premiers disques. Vous a-t-il paru évident de leur redonner un nouveau souffle ?
Hansi : C’était évident car c’était nécessaire, puisque notre contrat avec notre ancienne maison de disque allait devenir caduque, et les droits d’auteurs allaient nous revenir. Cela signifie que ces albums n’étaient pas disponibles sur le marché pour une certaine durée. Il était donc important pour nous que nous republions ces disques. En effet, comme la demande des albums est toujours aussi grande, il aurait été idiot que de les laisser de côté. Cependant si l’on republie ce genre d’œuvre, il est tout à fait légitime de retravailler dessus. C’était donc l’occasion et le moment de faire une remasterisation, ce qui correspond aux temps actuels. Il faut dire que lorsque nous avons publié ces deux albums en question, il ne s’agissait que de copies physiques, et c’est comme ça qu’avaient été produits ces albums. Si l’on veut cependant aussi satisfaire le consommateur de streaming, il n’y a pas d’autre choix que d’adapter cela aux circonstances actuelles. C’est ce qui s’est passé et était donc absolument nécessaire. Tant que l’on y est, on change quelque peu le booklet. Dans le cas de Touched by the Crimson King, Jon n’était pas exemple pas fan de l’artwork du deuxième album, il a donc retravaillé dessus lui-même, ce qui a donné un super rendu. Une partie des gens aussi penche vers les vinyles, et là aussi il y avait de fortes demandes, et ce serait bête de notre part de ne pas aussi le prendre en compte. Il faut aussi dire que lorsque nous avons quitté notre maison de disque précédente, que nous voudrions faire le nouvel album de Demons & Wizards, la maison de disques était aussi intéressée par tout ça.
DEMONS & WIZARDS - Diabolic (OFFICIAL VIDEO)
DEMONS & WIZARDS - Wolves in Winter (OFFICIAL VIDEO)
Laetitia : Parlons maintenant de ce troisième album. Pour commencer, pourquoi III ?
Hansi : Si je devais retourner en arrière, c’est Touched by the Crimson King qui ne devrait pas s’appeler comme ça. Nous voulions au départ établir une énumération continuelle de nos albums, et en tant que grands fans de rock, nous nous dirigeons surtout en fonction de la recette des 4 albums. C’était le cas autrefois de juste numéroter chaque album. Nous avons donc quelque part interrompu cette règle avec Touched by the Crimson King, règle que nous avons en quelque sorte rétablie en nommant cet album « III ». Si l’on se penche sur le premier titre Diabolic, il s’agit de trois protagonistes : Lucifer, Belzébul et Satan. Ils représentent la trinité maléfique, et c’est là qu’on a de nouveau un rapport avec III. Si l’on regarde de même le mysticisme religieux moyenâgeux, le chiffre trois a une signification considérable.
Laetitia : Plus en détails, s’agit-il d’un concept-album ? Quelle histoire raconte-t-il ?
Hansi : Le titre n’a pas d’autre rapport avec les autres chansons, c’est tout simplement une réalité factuelle qu’il s’agit de notre troisième album. Pour moi, le sens complet ne s’est révélé qu’ensuite. Il est question de onze chansons, et si l’on met de côté trois, elles racontent toutes des histoires individuelles. Toutes les onze chansons en revanche traitent du surnaturel de la nature humaine. Nous ne sommes plus naturels avec tout ce qui fait notre être, ce qui entraîne du positif et du négatif. Même s’il s’agit d’histoires individuelles, cela se reflète au travers des textes de chaque chanson. Il a des versions individuelles de cette notion, comme par exemple le voyage spirituel de Jon qu’il a fait dans les montages, où il ne devient qu’un avec ses réincarnations. Le télévangéliste procède à une manipulation de masse de manière assez absurde, mais garde son succès. Dans une société dystopique très similaire à la nôtre, le fratricide est un procédé très répandu pour mener les adolescents dans leur vie d’adulte. Cette société en anglais s’appelle “Children of Cain”. Trois titres, Invincible, New Dawn et Universal Truth parlent comme une autre langue musicale que le reste de l’album. Je les ai dédiés à la trilogie “His Dark Materials” de Philip Pullman.
Laetitia : Comment a-t-il été composé ?
Hansi : Quand nous commençons à travailler ensemble, le travail est en général assez efficace. En règle générale, Jon m’envoie un premier jet musical assez basique assez détaillé qui en général transmettent bien les émotions. J’essaie de mon côté de m’adapter au niveau du chant. On en parle ensuite ensemble avec Jon, pour voir comment accorder les deux parties et éventuellement introduire quelques changements. Une fois que nous en sommes arrivés à ce point, nous sommes capables d’établir une pré-production, ce après quoi les chansons sont en général comme nous voulons les avoir telles quelles dans l’album, et nous répartissons les tâches ; qui doit écrire quel texte. Nous enregistrons ensuite. Après nous nous retrouvons devant le choix de comment agencer l’album et dans quel ordre placer les chansons, ce qui s’établit au fur et à mesure des nombreuses écoutes. On trouve la chanson Diabolic au départ comme c’est une sorte de déclaration. C’était selon nous presque indispensable comme nous n’avons pas été présents dans la scène sous ce nom pendant près de 15 ans. Cette chanson avait pour but de mettre en haleine pour l’arrivée de l’album. Nous voulions par ça montrer le nouveau souffle qu’a eu Demons & Wizards, mais aussi établir un lien avec le passé. Ça nous a réussi à la fin de l’écriture de Diabolic avec une forme d’atmosphère qui peut rappeler le premier album. Nous avons un titre appelé Heaven Denies qui a une fin atmosphérique similaire à Diabolic, et au niveau des paroles ils se rapprochent aussi.
Laetitia : Comment s’est passé l’enregistrement ?
Hansi : À l’époque, nous avions un peu de pression puisque début mai nous devions commencer les répétitions et Jon viendrait ensuite en Allemagne. Une grande partie devait donc être enregistré au préalable, ce que nous avons fait aux Etats-Unis, dans le studio de Jon. Nous avons travaillé avec Jim Moris, qui a travaillé avec nous dans les deux premiers albums pour l’engeneering et le mixage. Il intervient aussi musicalement, comme il est très bon guitariste. Jon joue en soi tous les autres instruments, mais il n’est pas ce virtuose de solos, ce pourquoi nous avons fait appel à Jim Moris. Plus tard aussi à Jake Dwyer. Tous ces ensembles musicaux ont été constitués entre début mars et au début du printemps, après quoi Jon est venu en Allemagne. J’ai à partir du mois d’avril sporadiquement passé l’ensemble de mon temps libre à m’occuper des chansons jusqu’à la fin de la tournée aux Etats-Unis. À la fin de la tournée en septembre, nous sommes allés en Floride pour enregistrer l’album avec Jim Moris et finir la production.
Laetitia : Côté live, depuis 2008, Jon exprimait son désir d’enregistrer un live. J’imagine que c’est pour bientôt, n’est-ce pas ?
Hansi : Nous avons eu l’occasion dans les concerts précédents de faire des enregistrements, ce que nous avons en soi déjà fait dans 60 à 70% de nos concerts. Nous avons donc déjà du contenu. Nous avons de même enregistré un concert incroyable au Wacken, dont les droits nous reviennent. Nous serions donc en tant que tel en état de publier un DVD ou album live dès aujourd’hui, nous devons juste voir si et quand nous le ferions. Il était pour le moment important à nos yeux de finir cet album, qu’il est maintenant important de publier et d’attendre les réactions. Suite à cela nous n’aurons pas d’autre choix que de penser à nos groupes principaux, de travaillé avec Blind Guardian et Iced Earth, ce qui va nous occuper au moins pendant les deux années à venir. Peut-être penserons-nous à un moment à un album live, mais ça n’est pas planifié. Et considérant que nous devons repartir maintenant, nous ne ferons pour le moment pas d’autre concert.
Laetitia : Que réservez-vous à vos fans pour cette nouvelle année 2020 ?
Hansi : Pas grand-chose, nous allons publier cet album et je suis certain que ça va parler à tout fan de Demons & Wizards et toute personne qui a des oreilles. Par ça nous laissons un bel héritage derrière nous, suite à quoi nous allons nous concentrer sur nos groupes principaux. J’espère que dans un futur à venir nous serons de nouveau sur la scène en tant que Demons & Wizards, mais comme nous avons vu après Touched by the Crimson King, il peut se passer un peu de temps.
Laetitia : Avez-vous déjà eu l’idée un concert spécial de Demons & Wizards, avec Blind Guardian et Iced Earth ?
Hansi : Lorsque nous étions encore jeunes, oui. *rire* Mais ça a quelques années maintenant, et pour ma part je ne serais pas en état de faire deux concerts en une soirée. Pour l’alternative de Blind Guardian et Iced Earth qui jouent ensemble, et que l’on intègre 2-3 chansons dans un des deux sets, ça ne serait d’une part pas pareil et d’autre part ça ne ferait pas honneur à Demons & Wizards. Par ailleurs, la concentration serait tellement décalée que je ne pense pas que ce serait une bonne idée, et Jon certainement non plus. Il y parviendrait vraisemblablement mieux que moi, mais c’est au final aussi très fatigant pour un guitariste s’il faut retourner sur scène après une pause et de rejouer. Si j’ai joué 90 ou 120mn – 120mn en règle générale pour Blind Guardian – je n’en ai plus envie et je n’en suis par ailleurs pas capable.
Book of Shallows (feat. Hansi Kürsch, Ronnie Atkins, Jorn Lande, Mille Petrozza)
AVANTASIA - The Raven Child (OFFICIAL LYRIC VIDEO)
Laetitia : J'aimerais ouvrir une petite parenthèse pour évoquer avec toi ta participation au dernier album d'Avantasia de ce cher Tobias Sammet. Peux-tu me raconter ta collaboration sur les titres ”Book of Shadows” et ”The Raven Child”?
Hansi : Si l’on remonte en arrière, on se connait depuis les années 90. J’ai été appelé par le chef de sa maison de disque, lorsque Tobias ne venait que de former Edguy et le groupe commençait à avoir un peu de succès. Le chef de la maison de disque m’a demandé si j’avais envie de chanter avec un nouveau groupe encore inconnu, et si je voulais bien les aider et leur expliquer comme j’aborde l’étape du chant. J’ai accepté, et après avoir donné mon numéro Tobias m’a appelé, et m’a envoyé deux chansons d’Edguy, où j’avais chanté, et depuis nous sommes de très bons amis. Lorsqu’il a commencé Avantasia, il m’a appelé et m’a demandé si j’étais intéressé à l’idée de participer au premier album. Cependant c’est à l’époque où j’avais moi-même commencé Demons & Wizards, et ç’aurait été trop que de participer à cet autre projet, ce pourquoi j’ai dû décliner l’offre. Nous sommes depuis en contact en permanence et il y a environ 3 ans, lorsque nous étions ensemble à une interview, il m’a demandé si j’étais intéressé à l’idée de participer à un album. Tobias est une personne qui sait plus ou moins exactement ce qu’il veut, ce pourquoi j’ai accepté. J’ai juste prévenu que je ne pouvais pas trop participer, comme le temps me manquait, ce qui lui allait car il avait déjà des idées précises. Lorsque le temps est venu et qu’il m’a envoyé les chansons, elles étaient plus ou moins réalisées, je n’avais qu’à les interpréter pour moi-même et travailler à partir de ça, ce qui a été incroyablement amusant.
Laetitia : Avant de conclure, avez-vous garder les mêmes objectifs que vous aviez lors des débuts du projet ?
Hansi : Oui, c’est même très exactement le cas pour Demons & Wizards, puisque qu’en-dehors de toute relation amicale et professionnelle, c’est un projet ludique. Nous n’en dépendons ni professionnellement ni financièrement, nous ne sommes pas obligés de le faire si ça n’est pas vraiment quelque chose qui nous tient à cœur. Nous ne le réalisons vraiment que si quelque chose nous vient à l’esprit et que nous en avons envie. C’était aussi la même chose à l’époque lorsque nous avons commencé et que nous avons réalisé que nous sommes dans une bonne dynamique pour écrire des chansons. Nous étions amis et voulions réaliser quelque chose ensemble, ce qui est aujourd’hui encore le cas. J’ai toujours et encore l’impression que nous pouvons toucher le public avec ce que nous faisons. Nos buts sont donc finalement restés les mêmes. Nous avons un peu changé au niveau musical, ce qui est normal, tout comme nous sommes aujourd’hui des personnes différentes, pas de doute à cela, mais ça n’est rien d’atypique. À aucun moment je n’ai l’impression que quoi que ce soit est forcé ou que nous devons faire d’efforts plus que de mesure pour faire un album ou bien s’entendre. Je dirais donc que oui.
Laetitia : Pour finir, quel message avez-vous pour ceux qui suivent Demons & Wizards ?
Hansi : Tout d’abord je suis sincèrement désolé que nous ne jouerons ni cette année, ni la suivante. J’espère que nous rattraperons cela à l’avenir, puisque les chansons de Demons & Wizards de III méritent une performance live. Vous pouvez en revanche vous réjouir à l’avenir de la musique d’Iced Eath et Blind Guardian, et je peux promettre que des projets d’importance similaires vont voir le jour.
Un grand merci à Roger de Replica Promotion de nous avoir permis de réaliser cette interview.
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